Present tense ou le Sud de l'Afrique proche de la catastrophe

Un présent proche de la catastrophe voilà ce que suggèrent les 14 photographes africains sélectionnés par Antonio Pinto Ribeiro, commissaire de l'exposition du Centre Calouste Gulbenkian à Paris, dans le cadre du programme Next Future. 20 ans après la fin de l'apartheid en Afrique du Sud et autant d'attentes avortées dans toute cette région d'Afrique semblent nous dire ces images où la déception l'emporte bien souvent sur les enjeux. Comme un idéal rêvé confronté à un quotidien ravagé par l'esclavage et l'usurpation du pouvoir. L'espace public devenant cette ligne de démarcation et de revendication des droits. Aussi bien les mineurs d'Angola de Tsvangiraryi Mukwazi que les employés à bas prix de la Chineafrique de Sammy Baloji sont les victimes d'une menace mondialisée. Des rôles subalternes soudainement mises en lumière par l'humanité d'un Sabelo Mlangeni dans la "Big City de Johannesburg ou les hôtes mystérieux d'un cimetière de Mozambique qui cohabitent avec la mort par Mauro Pinto (Pique Nique). La nature se fait le reflet persistant de la mémoire comme dans la série Limbo de Dillon Marsh dans le quartier de Cape Flats, une banlieue résidentielle et ségrégationnistedu Cap. Guy Tilim également photojournaliste engagé avec Libreville Series n'en n'oublie pas cette part de sublime inhérente à la logique de l'évènement. Sorte de tension antagoniste, d'entre-deux pour reprendre le titre du projet "Empire of the In-Between" de Pieter Hugo qui résume à lui seul la démarche de toute cette génération. Un présent conflictuel publié dans le New York Times qu'il saisit le long de la voie ferrée qui relie New York à Washington. Pauvreté, chomage, criminalité que rejoignent les images de transformation féroce de la ville de Luanda par Délio Jasse, "Desencontro"qui veut dire décalage, inadéquation en français. Johannesburg, Le Cap, Luanda, Lusaka sont des villes où les murs du postapartheid s'érigent tels des forteresses. La série "Light Hours" de Mack Magagane témoigne de cette paranoïa de la sécurité grandissante. Un régime de peur et de tension explosive vu par les protagonistes d'une nouvelle histoire où les dimensions esthétiques et politiques restent les deux versant d'une même lutte.